Nécrologie Jean-Paul Montanari

L’ensemble du monde chorégraphique a rendu hommage à Jean-Paul Montanari, figure emblématique de la danse contemporaine, décédé le 25 avril 2025 après plus de quarante ans d’engagement au service de la création artistique et de Montpellier Danse, qu’il a dirigé jusqu’au 1er janvier dernier.
Né en 1949 à Boufarik, en Algérie, Jean-Paul Montanari rejoint la France en 1962, dans le contexte de l’indépendance algérienne. Il grandit à Lyon au sein d’une famille modeste, marquée par l’amour des arts et des libertés. Très tôt, il s’ouvre à la littérature, au théâtre, à la philosophie et au cinéma, nourrissant une pensée exigeante et engagée. Les mises en scène de Roger Planchon et Patrice Chéreau constituent pour lui une révélation décisive. Son parcours d’étudiant militant, notamment pendant les événements de mai 1968 et dans les luttes pour les droits LGBTQ+, pose les fondements d’une trajectoire où l’art et l’engagement demeureront indissociables.
Programmateur au Centre dramatique national de Lyon, il initie une politique d’ouverture à la danse contemporaine, accueillant notamment Maguy Marin et Dominique Bagouet. Il fonde ensuite à Villeurbanne un festival dédié aux musiques et danses extra-européennes. Au début des années 1980, il rejoint Montpellier où il crée, aux côtés de Dominique Bagouet et de Georges Frêche, le Centre chorégraphique national et le festival Montpellier Danse. Sous sa direction, ce dernier deviendra une référence internationale pour la danse, salué pour la qualité de sa programmation et son engagement constant en faveur de la création chorégraphique.
Jean-Paul Montanari a défendu avec détermination une vision exigeante de la danse, conçue comme un art majeur, à la fois poétique et politique. Il a ouvert les scènes montpelliéraines à de très nombreux artistes de renommée mondiale, parmi lesquels Trisha Brown, Merce Cunningham, William Forsythe, Ohad Naharin, Anne Teresa De Keersmaeker, Angelin Preljocaj, Emanuel Gat ou Raimund Hogue. Il a toujours affirmé que « tous les corps sont des corps politiques », conférant à la danse un rôle essentiel dans la compréhension des mutations du monde. Observateur lucide des évolutions culturelles, il n’a cessé d’alerter sur les menaces qui pèsent sur les politiques culturelles ambitieuses, dénonçant notamment les dérives populistes et la fragilité croissante des lieux de production artistique. Pour autant, il conservait une foi intacte dans la capacité de l’art à transformer la réalité, affirmant : « Ne faire confiance qu’aux artistes, les seuls à savoir transfigurer l’horreur en beauté. »
Malgré la maladie, Jean-Paul Montanari était présent lors de la présentation de la 45e édition du festival Montpellier Danse – qui se tiendra du 21 juin au 5 juillet 2025– qu'il imaginait comme une célébration de la création contemporaine, avec 70% de créations, une pluralité d’artistes internationaux, la fidélité de grandes compagnies (Batsheva, Akram Khan), et une attention constante portée à l’émergence.
Il laisse derrière lui une nouvelle structure, l’Agora – Cité internationale de la danse, réunissant Montpellier Danse et le Centre chorégraphique national, créée en lien avec Michaël Delafosse, maire de Montpellier, et les partenaires institutionnels. Elle sera dirigée conjointement par les chorégraphes Hofesh Schechter et Jan Gallois, et par les administrateurs Dominique Hervieu et Pierre Martinez, un collectif nommé le 10 avril dernier.

Delphine Goater, vice-président Danse du Syndicat de la Critique et Critique et coordinatrice danse ResMusica et Ballet 2000 France
Photo  © C. Ruiz

L’APPEL À CANDIDATURES DES BOURSES JEUNES CRITIQUES 2025 EST OUVERT !