Bords de plateaux Après sa présence au festival Faits d’hiver en janvier dernier, le Syndicat Professionnel de la critique Théâtre, Musique et Danse a organisé deux bords de plateaux le 23 mai et le 8 juin lors du festival de danse June Events, dirigé par Anne Sauvage. Le premier a été animé par Brigitte Rémer, secrétaire générale et Jean Couturier, membre du Comité, à propos du spectacle Vagabundus du chorégraphe mozambicain Idio Chichava, dansé par sa Compagnie, Converge +. Après le spectacle, interprété par six danseuses et sept danseurs - Idio Chichava s’est prêté au jeu des questions-réponses lancées sur son travail, son itinéraire, son inspiration, son langage chorégraphique. Idio Chichava a commencé la danse en 2000 dans un groupe de danse traditionnelle puis s’est formé à la danse contemporaine avec différent.e.s chorégraphes dont Anne Teresa De Keersmaeker et Lia Rodrigues. Il est retourné travailler dans son pays, le Mozambique, il y a trois ans, après une quinzaine d’années passées en France. S’exprimant en français, il a été rejoint par les danseurs qui sont entrés dans le débat à la fin de la séquence. « Ce retour au Mozambique, c'était pour moi la possibilité́ d'être avec la communauté́ de danseurs et d’inventer avec eux une dynamique assez frénétique d'entrainement, de rencontres, de réflexion, de création… Il s'agissait aussi de répondre aux besoins de la danse au Mozambique en réfléchissant aux possibilités de l'institutionnaliser, de structurer le chemin d'un danseur professionnel » a-t-il dit. Idio Chichava s’est exprimé sur le processus de création qu’il a mis en place à partir des chants et des musiques traditionnelles du pays, la particularité du groupe étant de produire ses propres rythmes et de chanter tout en dansant. Il s’inspire ici de la danse du peuple Makonde vivant au nord du Mozambique, une région qui a dû faire face à des attentats terroristes, et a construit avec les danseurs-chanteurs de la compagnie un langage corporel qui leur est propre. Dans Vagabundus s’entremêlent musiques, corps social basé sur les solidarités et les synergies, corps global comme il définit l’ensemble du groupe dont les interprètes forment un tout. Il parle de l’appel, de la perte de parole, de la course, de la lutte, de la transe. Dans le langage mis en place par le chorégraphe, chacun est à son tour un potentiel leader qui entraine les chœurs et psalmodies en décalés, rythmant les gestes. Le souffle, la prière expiatoire, la compassion, l’imploration, la théâtralisation s’inscrivent dans ce langage. Les participants au débat ont posé des questions sur les objets symboliques et fétiches portés et apportés par les danseurs, éléments du quotidien comme tissu, panier, sac, corde, bout de bois, pneu. Idio Chichava et les danseurs se sont aussi exprimés sur les mouvements d’ensemble évoquant comme des embarcations, Vagabundus signifiant l’errance. Le 8 juin, Delphine Goater, membre du Comité, Antonella Poli, vice-présidente pour le collège danse et Denis Sanglard, secrétaire général adjoint, ont pu échanger avec la chorégraphe d’origine argentine et résidente en Belgique, Ayelen Parolin à l’occasion de sa dernière création, Zonder, pour la clôture du festival June Events. La chorégraphe, arrivée en Europe en 2000, réside à Bruxelles et développe son travail avec sa propre compagnie, Rudra. Zonder reprend certains éléments caractéristiques de son style : ironie et propos de déconstruction, animés par la volonté de critiquer notre société capitaliste. Les trois interprètes, espiègles, créent la rythmique de la pièce avec leurs entrées et sorties sur scène, leurs mouvements devenant des gestes irrespectueux des règles, presque instinctifs. La tension monte au fil de la performance, en arrivant à créer des moments qui rendent le public hésitant sur leur réalité. Ayelen casse les codes comme le font deux artistes sur scène en cassant deux portions du plateau.Les journalistes animant le bord de plateau ont évoqué le parcours artistique de l’artiste en discutant sur les points communs avec sa précédente création, Simple, également un trio, inspiré et plein d’ironie sur le langage de Merce Cunningham.Avec Zonder, Ayelen Parolin met en discussion une vision impérialiste de la société.Interrogée sur le choix musical employé dans la deuxième partie de la pièce, une valse de Strauss, symbole des fastes de l’Empire Austro-hongrois, elle a répondu que cette musique faisait partie de celles écoutées dans sa jeunesse, sans vraiment lui attribuer une vraie signification. Le public a suivi attentivement et est intervenu pour souligner la réussite de la pièce. Prochaines dates :Bord de plateau : festival Radio France Occitanie Montpellier le 9 juillet Conversation critique : festival d’Avignon le 15 juillet à 17h30 au Café des Idées